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Pourquoi faisons-nous 80% de nos tâches en 20% de notre temps ?

L’homme n’aime pas le travail. Ce constat un peu provocateur a conduit le philosophe Guillaume Ferrero à proposer, en 1894, le principe de moindre effort, une règle fondamentale régissant l’être humain.

Est-ce constat juste ? A quoi ce principe peut nous servir aujourd’hui ?

L’équipe du laboratoire SCIQ de l’ESIEA* a récemment trouvé un lien mathématique entre ce principe et les vastes phénomènes regroupés sous la loi de 20-80.

Suivez-vous le principe de moindre effort ?

Travailler moins et gagner plus, ou plus généralement, faire plus avec moins. Personne n’est contre cette règle tellement banale et cela va sans dire, tout comme acheter plus avec moins d’argent, exprimer vos idées avec moins de mots, apprendre plus en moins de temps, ou conduire plus vite (attention à la limite de vitesse), ainsi de suite.

Ces phénomènes ne sont que des manifestations du principe de moindre effort : obtenir plus en faisant moins. Banal, certes, mais fascinant si on peut l’utiliser pour construire des théories scientifiques.

Loi de 20-80 de Pareto

Il y a plus de 100 ans, Pareto découvre la loi de 20-80, une proportion omniprésente autour de nous. Par
exemple, 20% de la population possède 80% de richesse, 20% de salariés assument 80% de chiffres
d’affaire, 20% de mots dans un texte représentant 80% de volume, 20% de data bases contiennent 80% de données, et plus terre-à-terre, 20% de nos amis occupent 80% de notre temps relationnel, dans 80% de cas nous ne portons que 20% de nos vêtements ou chaussures, et seulement 20% (même moins) des numéros figurant dans notre carnet de contacts représentent 80% de nos appels passés ! Cette liste peut être rallongée ainsi sans fin, tellement cette règle est générale et utile dans de très nombreux domaines.

Quel rapport ?

Cette proportion 20/80 omniprésente est d’autant plus curieuse voire fascinante qu’elle est observée dans des systèmes de natures tellement disparates. Une idée géniale plane depuis longtemps dans l’air : la loi de 20-80 n’est autre qu’un effet du principe de moindre effort. En termes plus directs, le ratio 20-80 est partout simplement parce que les vivants sont paresseux, et dépensent toujours moins pour obtenir plus ! Les scientifiques, à commencer par Zipf, étaient convaincu de cette causalité qui restait malgré tout du domaine de spéculation sans preuve mathématique.
Récemment, l’équipe SCIQ ont trouvé une preuve de cette causalité tant attendue : la loi de 20-80 déduite directement du principe de moindre effort, tout comme en physique on déduit toutes les lois physiques à partir d’un seul principe de moindre action. Le premier article de l’équipe présentant ce résultat est publié dans la revue Chaos, Fractals & Solitons (Décembre 2021).

Au-delà de la déduction des lois, ce travail a fait ressortir une fonction d’efficience qui peut être utilisée comme un outil très général d’évaluation de l’efficacité de tout type de processus et d’actions. Un tel outil n’existe pas dans de nombreux domaines, par exemple en matière d’éducation, de management, d’apprentissage, d’écriture, de diffusion et de recherche d’information, etc.

A l’heure actuelle des études sont en cours sur cette efficience et également sur le lien existant ou non entre le principe de moindre effort et un phénomène social et relationnel très connu appelé attachement préférentiel : les riches seront plus riches, les grands plus grands, les attractifs plus attractifs….

Et en deux mots : l’attirance attire. L’effort continue.

*Laboratoire Systèmes Complexes et Informatique Quantique (SCIQ) de l’ESIEA (Ecole supérieure d’ingénieurs d’un numérique utile), dirigé par Alexandre Wang et composé de 7 membres, mène des études fondamentales en science de complexité et information quantique. Certains des travaux publiés se trouvent sur le site ResearchGate. Le laboratoire propose également des stages aux élèves d’ingénieurs en formation par la recherche.

Article rédigé par 𝐀𝐥𝐞𝐱𝐚𝐧𝐝𝐫𝐞 𝐖𝐚𝐧𝐠, physicien enseignant-chercheur à l’Ecole Polyvalente Supérieure d’Informatique, d’Electronique et de Management et professeur associé à l’IMMM – Institut des Molécules et des Matériaux du Mans – UMR CNRS 6283.

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